Combien de temps consacrer à sa thèse ?
Pour plus de clarté, nous considèrerons ici que le temps de travail de thèse ne concerne que l’objet de la thèse (recherches, rédaction, bibliographie, mise en page etc…) et non les activités de recherche (publications, communications, vulgarisation, organisation de manifestations scientifiques etc…).
C’est une question qui taraude nombre de doctorants : combien de temps consacrer à son travail de thèse…? Il faut dire que l’on se lance en thèse sans savoir vraiment à quoi doit ressembler ce travail : comment faire des recherches ? Quand passer à la rédaction ? Le monde du doctorat et ses applications concrètes sont souvent très floues et les doctorants apprennent tout cela sur le tas. Cet article vise donc à apporter quelques réponses sur la gestion du temps en thèse, tant d’un point de vue microscopique (quel temps par jour ? Par semaine ?) que macroscopique (sur la durée du doctorat).
I. La gestion du temps de travail
Selon un sondage réalisé en février 2022 auprès des doctorants du CAS (7 participants), 71,4% des doctorants se sentent coupables d’accorder le temps qu’ils accordent à leur thèse.
La plupart des doctorants ayant répondu au sondage travaillent sur leur thèse entre 9h et 24h par semaine :
A la question “selon vous, combien de temps faudrait-il accorder à sa thèse par semaine ?“, les réponses oscillent entre 20h et 30h. Certains évoquent 4h de travail par jour du lundi au vendredi. Il est donc possible de constater que les objectifs théoriques sont de manière générale bien supérieurs aux estimations pratiques des doctorants : tous souhaiteraient accorder plus de temps à leur thèse (100% des répondants). Selon une enquête de l’Observatoire de la Vie Etudiante (OVE) de juin 2010, les doctorants en SHS travaillent en moyenne 18,9h en semaine et 5,8h le weekend, ce qui rentre dans la fourchette qui ressort de notre sondage.
La notion de temps de travail appliquée au doctorat est délicate, car un doctorant ne sort jamais tout à fait de son travail de thèse : les coupures ne sont pas nettes, et il n’est pas rare de travailler le weekend ou en soirée. En outre, plusieurs facteurs sont à prendre en considération : en quelle année de thèse est le doctorant ? Est-il financé ? Si oui, combien d’heures de cours donne-t-il ? Car l’enseignement est, pour 42,9% des répondants au sondage, l’une des entraves au travail de thèse. Il faut dire qu’entre la préparation des cours, les cours et les corrections, le temps file. L’une des pistes proposées serait de ne faire que le strict minimum pour les cours, mais beaucoup ne peuvent s’y résoudre, d’une part car l’enseignement leur plaît (et il s’agit d’une véritable respiration lorsqu’on est en doctorat…!), et d’autre part car ils veulent donner le maximum pour leurs étudiants. Alors comment faire…?
La réponse risque d’en décevoir plus d’un : il n’existe pas de solution miracle. Nous évoquons souvent ce sujet lors de la journée Thesis in Progress, car elle angoisse beaucoup de doctorants (à juste titre), et nous apportons toujours la même réponse : chacun doit trouver son rythme, et ne surtout pas chercher à imiter tel ou tel collègue. Certains seront efficaces sur des plages de travail courtes et écriront 4 pages en 2h, alors que certains auront besoin de travailler 8h d’affilée. C’est en cela qu’il est particulièrement compliqué de donner une réponse précise à la question du temps de travail. Il est impossible d’être prescriptif.
Néanmoins, nous pouvons tout de même vous prodiguer quelques conseils :
- Faites des pauses ! Les pauses sont salvatrices. Bien évidemment, plus la soutenance approche plus il devient difficile de mettre son travail de côté, mais il faut s’y astreindre. Idéalement, il faudrait pouvoir mettre la thèse en pause le weekend, ou au moins un jour par semaine.
- Il vaut mieux travailler “peu” de manière régulière plutôt qu’en dents de scie. Le problème, c’est que nous sommes nombreux à suivre un rythme irrégulier…! Difficile de travailler sur la thèse un jour de cours ou lorsqu’on a une publication à rédiger. Si quelques jours ne posent pas de souci, il est vrai que se remettre dans le bain après une semaine de pause peut s’avérer compliqué (surtout lorsqu’on rédige).
- Tenez un journal de rédaction : si vous souhaitez faire un état des lieux de votre productivité, n’hésitez pas à créer un journal de thèse sur traitement de texte, papier, ou excel. Vous en trouverez un exemple / template ici, créé par nos soins (et vraiment utilisé !). Il peut être intéressant de se rendre compte du nombre de pages que l’on peut rédiger sur un semaine. Néanmoins, évitez de tenir un journal si cela doit vous mettre sous pression, ce n’est absolument pas le but…! Chacun doit trouver la méthode qui lui convient, sans induire de stress supplémentaire.
- Suivez la technique POMODORO, présentée ici (vidéo) : développée par Francesco CIRILLO dans les années 1980, la technique POMODORO vise à intercaler des pauses régulières dans son travail. Traditionnellement, elle préconise de travailler 25mn puis de prendre 5mn de pause, de recommencer ce cycle 3 fois et de faire une pause plus longue (15-30mn) avant de recommencer. Si ces plages de travail ne vous parlent pas, veillez simplement à faire de pauses régulières.
- Adaptez votre tâche du jour à votre état : le travail de thèse ne se résume pas à la rédaction pure. Si vous n’avez qu’une heure devant vous ou si vous êtes épuisé, pourquoi ne pas travailler la mise en page ? La bibliographie ? Plein de tâches peuvent être effectuées avec un niveau de concentration moindre que celui requis pour la rédaction, et elles sont tout autant utiles.
- Dans la continuité du point précédent, ne cherchez pas à tout prix à travailler si vous ne vous en sentez pas la force. Il y a des “jours sans”. Profitez-en pour vous requinquer et pour faire autre chose !
II. La durée du doctorat
Voici la question qui fâche, mais dont il est impossible de faire l’économie dans un article consacré au temps et à la thèse…! En effet, si le temps alloué au travail de la thèse est source de stress, c’est que les doctorants veulent la finir le plus rapidement possible : pour prétendre à d’autres types d’emplois, pour réaliser un projet professionnel ou familial… et parce que le durée du doctorat en France est cadrée.
Depuis 2016, la durée maximale d’un doctorat est de 6 ans : comme le dispose l’article 14 de l’arrêté du 25 mai 2016 sur le doctorat, “La préparation du doctorat, au sein de l’école doctorale, s’effectue en règle générale en trois ans en équivalent temps plein consacré à la recherche. Dans les autres cas, la durée de préparation du doctorat peut être au plus de six ans”. Cela signifie qu’après 3 ans, il faut demander une dérogation à chaque rentrée pour se réinscrire en thèse.
Dans les faits, en SHS, la plupart des doctorants dépassent les 3 ans de doctorat, même lorsqu’ils ont bénéficié d’un contrat doctoral : selon le Ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, “plus de 6 docteurs sur 10 ont préparé leur thèse pendant au moins 52 mois avant de pouvoir la soutenir et seuls 13 % de ces docteurs ont obtenu leur diplôme en moins de 40 mois”. Ainsi, la plupart des doctorants en SHS consacrent au moins 4 ans à leur thèse.
Comment envisager toutes ces années au moment de sa première inscription ? Comment planifier les étapes de sa thèse ? Là encore, difficile d’être prescriptif, mais il vaut mieux commencer à rédiger le plus tôt possible (sans pour autant négliger la phase de recherches). Ne vous lancez pas dans la thèse en vous disant “je passerai 2 ans sur les recherches et 1 an sur la rédaction”, car dans la majorité des cas, les différentes phases se superposent : la phase de rédaction est entrecoupée de nouvelles recherches, surtout si vous devez effectuer des changements dans le plan (ce qui arrive très souvent !). Pour ces raisons, il est très difficile de “découper” la durée de son doctorat en étapes bien délimitées.
Nous courrons tous après le temps, mais il vaut mieux prendre (raisonnablement) son temps plutôt que de se précipiter et négliger la conceptualisation du sujet, la rédaction ou l’architecture du plan.
Retrouvez les résultats complets du sondage ici (pdf).
Autres ressources :
“Doctorat et gestion du temps”, Carnet de recherche ED58 – Université Paul Valéry (Montpellier)
“Gestion du temps : trois pièges à éviter quand on rédige sa thèse” – Scriptoria
“La thèse et le temps” – Histoires à lunettes
“Combien d’heures travailler sur sa thèse ?” (vidéo) – Erika Dupont
“Concentration et attention en profondeur : durée moyenne et durée idéale” – Le Temps reconquis
OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
doctoratcas (12 avril 2022). Combien de temps consacrer à sa thèse ? Carnet des Doctorants du C.A.S. Consulté le 24 mai 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/nvhb